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Métaphysique de la mendicité

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Métaphysique de la mendicité

Il portait une chemise de flanelle légère, sa tête était surmontée d’un élégant chapeau estival et un short sobre couvrait ses jambes poilues. Il était à peu près quatre heures de l’après-midi, et la chaleur de la journée devenait presque étouffante bien que le ciel fut bardé de nuages gris. Il faisait lourd ; on sentait presque les gouttelettes d’humidité se déposer à la surface de nos peaux découvertes pour l’occasion d’un été qui s’approche.

Il avait une barbe naissante, des yeux clairs, de petites joues rebondies, un nez droit, un front ni trop long, ni trop large, et de courts cheveux très noirs qui dépassaient de son chapeau. Dans ses deux mains, il portait une clarinette dont le bec finissait dans sa bouche entourée par de petites lèvres très serrées, la anche bien ancrée sur l’inférieure sans toucher les dents. Il était devant la sortie de la gare, seul avec un ampli derrière qui diffusait de la musique. Devant lui une sacoche Adidas, avec dedans un vieux gobelet Coca en carton de McDo’ destiné à recueillir les pièces.

Car ce jeune homme de moins de trente ans, aux yeux bruns pétillants qui avaient l’air si heureux, faisait la manche. Était-il clochard ? Il n’en avait pas l’air, mais peut-être que des a priori éculés viennent nous laisser penser à tort que les clochards qui parsèment les rues sont nécessairement nauséabonds, une odeur de bière rance dans leur haleine fétide, et que leurs corps crasseux ne s’habillent que de guenilles trouvées derrière une poubelle ou récupérées d’une benne Emmaüs débordante. Leur barbe mensuelle purulente serait leur apparat distinctif, leurs nombreuses rides prématurées seraient reconnaissables d’entre toutes, leur démarche bancale, leurs dents jaunes quand il leur en reste, leur façon de parler en mangeant leurs mots comme si la faim qui les consumait débordait dans toutes les petites actions de leur vie quotidienne, tout ce qui ferait qu’un clochard est un clochard, ne possédant qu’une couverture et supportant les giboulées de mars ou les averses de novembre sans ne pouvoir rien dire ou faire, peut-être que tout ceci n’est pas la vérité de ceux qui, plus que de n’habiter nulle part, vivent partout.

(...)
Lire la suite : Métaphysique de la mendicité (413 words)


© Araen for Antithese, 2013. | Permalink | Pas de commentaire, laisses-en un peut-être :) |
Catégorie(s) : Ma vie, Tendre désespoir
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